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Les Sondo, un Sous-groupe du Peuple Baoulé de Côte d’Ivoire

Les Sondo (Baoulé) — Rapport d’expertise

Sous-groupe baoulé du département de M’bahiakro (Côte d’Ivoire) — histoire, géographie, structures sociales, expressions culturelles et dynamiques contemporaines.

Introduction : Objet de l’Étude et Approche Méthodologique

La présente étude a pour objectif de produire un rapport d’expertise détaillé et exhaustif sur les Sondo, un sous-groupe du peuple Baoulé de Côte d’Ivoire. Le rapport s’appuie sur une analyse critique de documents de recherche variés, allant de l’ethnographie à la linguistique, en passant par l’histoire et la sociologie. Il vise à dépasser la simple compilation de faits pour dégager des tendances, des causalités et des dynamiques sous-jacentes qui éclairent l’identité unique de ce groupe.

Les sources sans lien (logiciel « Sondo », peuples sénoufo/kanak, etc.) ont été écartées afin de concentrer l’analyse sur le cœur de la requête. Le rapport s’articule autour de l’histoire, de la géographie, des structures sociales, des expressions culturelles et des dynamiques contemporaines des Sondo, en les situant dans le contexte plus large du peuple Baoulé et de l’État ivoirien.

Chapitre I : Contexte Géographique et Origines Historiques des Sondo

1.1. Positionnement des Sondo au sein du peuple Baoulé et du groupe Akan

Les Sondo constituent l’un des quelque vingt sous-groupes qui composent le peuple Baoulé. Les Baoulé sont eux-mêmes une composante majeure du grand groupe ethnique Akan. Originaires du royaume ashanti (actuel Ghana), les Baoulé se sont établis en Côte d’Ivoire entre les fleuves Bandama et Comoé. Le baoulé est l’une des deux langues africaines les plus parlées du pays, à peu près à égalité avec le dioula.

1.2. Géographie des Sondo : le département de M’bahiakro

L’aire géographique spécifique des Sondo est le département de M’bahiakro, où ils constituent la population majoritaire dans la partie nord. Des subdivisions locales, tel un « Sondo savane », suggèrent une différenciation interne liée aux milieux. Les Sondo partagent le territoire avec les N’Guin (occupants anciens) et les Adjié‑Abbey (venus de Tiassalé). Originaires de Sakassou, les Sondo se sont d’abord établis à Abokro avant leur implantation actuelle.

Cette présence est le fruit d’une migration structurante. La différenciation interne (p.ex. « Sondo savane ») peut être lue comme une adaptation au milieu d’installation.

1.3. Le mythe fondateur des Baoulé : la légende de la Reine Pokou

Le nom « Baoulé » proviendrait de Ba ou li — « l’enfant est mort » — en référence au sacrifice du fils de la reine Pokou pour permettre la traversée du fleuve Comoé lors de l’exode depuis le Ghana. Ce mythe, pilier identitaire, cimente une mémoire et un système de valeurs partagés par l’ensemble des sous-groupes, Sondo compris.

Chapitre II : Organisation Sociale et Structures de Parenté

2.1. La chefferie traditionnelle Sondo

À l’instar des autres Baoulé, les Sondo sont organisés autour d’une chefferie traditionnelle qui coexiste avec l’administration civile. Un chef de canton — tel M’bahia Kouamé, à la tête du Canton Sondo de 1914 à 2006 — assume des fonctions exécutives et judiciaires locales. Les autorités coutumières, souvent fédérées en associations, s’impliquent dans la gestion des conflits fonciers, des tensions agriculteurs‑éleveurs et de l’orpaillage clandestin, révélant une adaptation de leurs rôles aux enjeux contemporains.

2.2. Complexité de la filiation : matrilinéarité, patriarcat et mariage

La société baoulé est classiquement décrite comme matrilinéaire, mais la réalité est plus nuancée. Le mariage « ordinaire » est matrilinéaire (la femme conserve ses liens d’origine) tandis que le mariage « des nobles » (atovlè) adopte une transmission patrilinéaire, la femme s’intégrant au lignage de son époux. Certains sous‑groupes (p.ex. Kodè) ont historiquement adopté des formes patriarcales au contact de voisins (Gouro, Ouan). Compte tenu des interactions à M’bahiakro (N’Guin, Adjié‑Abbey), les Sondo présentent vraisemblablement une parenté nuancée, située entre normes idéelles et pratiques adaptatives.

Chapitre III : Culture, Croyances et Expressions Artistiques

3.1. Pratiques religieuses et rituelles

Cosmologie centrée sur Nyamien (dieu créateur, intangible) et Assiè (dieu de la terre, régissant humains et animaux). Vénération d’esprits (Amuen) et recours à des fétiches (Allangba, Allou, Déla, Diby) protecteurs ou guerriers. Les cérémonies incluent des formes sacrificielles telles que le Saraka.

3.2. Patrimoine artistique et symbolique de l’or

Sculpture sur bois (figurines de « conjoints spirituels » — blolo bla, blolo bian —, statuettes de chasse bo usu), tissage de pagnes (cinq types principaux recensés). L’or — bijoux, poids à peser l’or — est symbole d’héritage, d’opulence et de pouvoir ; sa place centrale s’enracine autant dans l’économie que dans le sacré.

3.3. Danses et musiques : empreints, circulations, réinterprétations

Les danses baoulé mêlent fonds communs (adjoss) et aires régionales (adjémlé, kôtou). Le goli, célèbre, est emprunté aux Ouan (chants conservés en langue ouan). D’autres masques, comme Djê (gouro) ou Goly (wan), illustrent la dynamique d’appropriation sélective et de syncrétisme culturel.

Tableau 3 : Danses baoulé et influences externes
Nom de la danse / masque Lieu de pratique Origine extérieure Spécificités
Goli Béoumi, largement répandu Ouan (chants en langue ouan) Importé, remplace des danses masquées locales
Adjémlé Sakassou, Diabo Style régional
Kôtou Tiébissou, Yamoussoukro, etc. Proche de l’adjémlé
Adjoss Toutes régions baoulé Fonds commun
Djê (masque) Gouro Masque protecteur
Goly (masque) Wan Esprit de la forêt
3.4. Systèmes de dénomination

Les prénoms se déterminent par jour de naissance (p.ex. Kouassi / Akissi pour lundi), ordre (N’goran 9e, Brou 10e, Loukou 11e), ou circonstances (Atoumgbré naissances hors foyer, N’da jumeaux, Amani enfant après jumeaux). Le patronyme dérivait traditionnellement du prénom paternel — pratique en recul avec l’état civil moderne.

Tableau 2 : Système de dénomination baoulé
Catégorie Nom (garçon) Nom (fille) Condition
Jour de naissance Kouassi Akissi Né(e) un lundi
Jour de naissance Kouadio Adjoua Né(e) un mardi
Ordre de naissance N’goran 9e enfant de la mère
Ordre de naissance Brou 10e enfant de la mère
Ordre de naissance Loukou 11e enfant de la mère
Circonstance Atoumgbré Atoumgbré Naissance hors de la maison
Circonstance N’da N’da Jumeau(elle)
Circonstance Amani Amani Naissance après des jumeaux

Chapitre IV : Langue et Spécificités Linguistiques

4.1. La langue baoulé : un membre de la famille Kwa

Langue tonale de la branche akan (Tano central) au sein du groupe kwa (Niger‑Congo). Majoritairement orale, dotée d’un alphabet officiel, le baoulé demeure la langue du quotidien.

4.2. Le parler des Sondo : variation dans la diversité

Les sous‑groupes, dont les Sondo, partagent la langue avec des variations surtout tonales et phonétiques. Le baoulé est officiellement parlé à M’bahiakro, ancrant pleinement les Sondo dans cet espace linguistique.

4.3. Étude de cas : parler walèbo de Sakassou

Des travaux sur le parler walèbo (Sakassou) décrivent, entre autres, la syntaxe de verbes « physiopsychologiques » et des patrons comme N + V + Hab + S, avec des verbes tels [kù] (« tuer ») et [ʒ́] (« faire ») dans des configurations spécifiques. Puisque les Sondo sont originaires de Sakassou, il est plausible que certaines spécificités s’y rattachent et persistent malgré la migration vers M’bahiakro.

Chapitre V : Dynamiques Contemporaines et Évolution Socioculturelle

5.1. Coexistence des autorités traditionnelles et de l’administration moderne

À M’bahiakro, chefs de canton et autorités coutumières interagissent étroitement avec préfet, député et maire. Leurs associations interviennent dans les conflits fonciers et l’orpaillage clandestin. Les cérémonies d’hommage aux représentants de l’État illustrent l’imbrication des deux systèmes de pouvoir.

5.2. Modernité et transformations des traditions

La moindre mobilisation des proverbes chez les jeunes signale des évolutions, mais la tradition ne s’éteint pas ; elle se reconfigure. Rôles de médiation, structuration associative, coopération avec l’État et pluralisme religieux montrent une résilience fonctionnelle de l’identité sondo.

Conclusion Générale

L’identité des Sondo résulte d’un processus continu de migration et d’interactions. De Sakassou à M’bahiakro, leur trajectoire a façonné leurs institutions et relations avec les peuples préexistants, sur fond de mythe commun de la Reine Pokou. Leur organisation sociale, entre matrilinéarité idéelle et ajustements patrilinéaires, révèle une plasticité adaptative. Le patrimoine culturel, nourri d’emprunts sélectifs (danses, masques), illustre un syncrétisme créatif plutôt qu’une fermeture.

Face à la modernité, la chefferie n’est pas marginalisée : elle réinvestit des fonctions de médiation et de gouvernance aux côtés de l’État. Cette dynamique atteste d’une tradition qui se transforme pour perdurer et d’une identité sondo qui s’affirme dans le contexte ivoirien contemporain.

Tableau 1 : Sous‑groupes baoulé et localisations géographiques
Sous‑groupe Région / Département
Akouè Yamoussoukro
Satiklan Botro
Gôly Bodokro
Oualébo Sakassou, Toumodi
Ahaly Brobo
Sondo M’bahiakro
Fali Nord de Bouaké
Dô’n Bouaké, Sakassou, Languibonou
Souhamlin Taabo
Faafwè Bouaké, Dimbokro
Andô Prikro
Elomoué Tiassalé
N’guin M’bahiakro
Yaouré Bouaflé, Bégbessou

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